A Huy, tous les gouts sont permis

Catherine Makereel - Le soir (19 août 2018)

Première moisson de spectacles pour enfants à Huy. « 2h14 », « Habanera », « Il est où le A du Zébu ? », « Grou ! » : retenez bien ces titres ! Ce sont les prochains « hits » de la cour de récré. Tendance Gus van Sant ou Indiana Jones, le théâtre jeune public fait mieux que le cinéma !

Disons que la scène jeune public est un mannequin qu’il faut rhabiller pour la nouvelle collection automne-hiver. Les Rencontres de Huy seraient alors le podium sur lequel défilent toutes les tenues possibles, de la haute couture au prêt à porter. Théâtre, danse, cirque, marionnettes, hip-hop, magie : tous les styles se mélangent sur ce catwalk en bord de Meuse. Certains modèles sont un peu dépenaillés mais d’autres ont la classe d’un tailleur Givenchy. Il est où le A du Zébu fait clairement partie de ces habits haut de gamme. On parie que les enfants (de 5 à 8 ans) vont bien se plaire dans cette étoffe ludique, taillée par Anne-Cécile Massoni et Eno Krojanker.

Sur le principe, tout simple, de jouer avec les lettres de l’alphabet, ce spectacle de Fast Asbl se transforme en une chasse aux trésors complètement décalée. Comme Georges Perec s’est piqué d’écrire tout un livre, La Disparition, sans jamais utiliser la lettre « e », Il est où le A du Zébu part lui en quête de la première lettre de l’alphabet. Si le « a » y joue à cache-cache, les enfants poussent surtout des « Oh ! » éberlués à mesure que nos deux « illettrés » dénichent consonnes et voyelles dans des boîtes à surprises. Comme une partie de scrabble où les lettres se mettraient à chanter, danser, dessiner ou gratter la guitare électrique, le spectacle donne vie aux mots avec une fantaisie déchaînée. Le vocabulaire y devient acrobatique ; les lettres voyagent sur le plateau en voiture téléguidée ou drone-téléporté ; on y apprend des mots compte triple ; on y croise un Elvis Presley dyslexique ; et on y pratique des jurons plus imagés que le répertoire du capitaine Haddock. Diablement soignée, la mise en scène ose toutes les embardées phonétiques et lexicales. La seule règle de grammaire qui vaille, c’est le plaisir de jongler avec les lettres. Avant même de savoir lire ou écrire, les enfants y choperont le goût de la langue, les joies de la métaphore ou encore l’ivresse des abécédaires. Voilà assurément une pièce à glisser dans la grande penderie des prochaines sorties scolaires. /.../